vendredi 4 septembre 2009

Zigzag à travers les Alpes occidentales (27.08-04.09.2009)

27.08.2009: Halle - Bruxelles - Bâle - Berne - Visp - Saas Grund

Dix-neuf (!) ans après mon premier essai sur le Mont Blanc (terminé par un échec douloureux qui m'a appris beaucoup sur la bonne préparation à une course en haute montagne), j'étais prêt à faire une nouvelle tentative sur le plus haut sommet des Alpes. Le programme d'acclimatation était génial dans sa simplicité: d'abord un 3000, ensuite 3 sommets culminant à plus de 4000m, pour être préparé un maximum à l'altitude, facteur qui m'inquiètait quand même un petit peu.

Traversée classique des Ardennes, du Luxembourg et des Vosges et changement de train à Bâle. Après l'arrêt à Berne, mon train rentre dans le nouveau Lötschberg Basistunnel pour finalement arriver à Visp. Avantage: j'arrive plus tôt dans le Valais. Désavantage: je ne m'arrête plus à Kandersteg, joli village au bout du Kandertal permettant des vues magnigifiques sur la chaîne de la Blümlisalp.

A Visp, je prends le Postbus pour Saas Grund. La vallée de Saas m'enchante vraiment: des deux côtés, d'enormes chaînes montagneuses se dressent (Weissmies et Mischabel), la vallée elle-même est très étroite à son début près du village de Stalden mais s'élargissant à partir de Saas Balen et permet ainsi de jolies vues sur l'Allalinhorn et tout le cirque de Saas Fee. A Saas Grund, je retrouve les dortoirs de Zurbriggen Sport et le restaurant Bergheimat, endroits familiers depuis mon séjour en 2005.

28.08.2009: Saas Grund, 1560m - Chreuzboden, 2397m - Weissmieshütten, 2726m - Jegihorn via ferrata (C/D), 3206m - Weissmieshütten



(extrait carte Swisstopo)

Après le petit déjeuner au restaurant Bergheimat, j'attends l'arrivée de Severin, mon compagnon allemand avec qui j'ai déjà fait la traversée de la Bernina et l'épopée Blümlisalphorn/Gspaltenhorn en 2008. Et voilà, a l'heure convenu, il déscend du bus en provenance de Visp ! Rapidement, nous nous mettons en route pour la télécabine qui nous épargnera les 900 mètres de dénivelé vers Chreuzboden, 2397m (nous ne sommes pas aussi hardcore que Rêveur 4000 D). Jolie vue sur le Fletschhorn, 3993m, et le Lagginhorn, 4010m.

Le massif du Weissmies, 4017m.

Après 45min, nous arrivons aux Weissmieshütten, 2726m. Nous avons encore toute la journée devant nous ! Notre premier objectif est le Jegihorn, 3206m, qu'on peut monter par deux chemins: la voie normale, randonnée de difficulté moyenne, et la très intéressante "Panorama-Klettersteig", de difficulté moyenne (dans le domaine des via ferrata) également (C), mais avec une variante difficile (D), qui comprend des passages spectaculaires comme le "pont suspendu" (voir la photo ci-dessus) et la "nid d'araignée". Naturellement, nous avons la via ferrata et sa variante comme objectif.


Après 20 min de marche, nous arrivons au pied de la paroi et mettons notre set via ferrata. Rapidement, nous gagnons de l'altitude. Tout cela n'est pas très difficile, en fait: un peu d'expérience en escalade sur falaise et un manque total de vertige rendent ce genre d'ascension très agréable.

Pour rendre le tout encore plus intéressant, je recommande quand même d'essayer de grimper la via ferrata en "libre", c'est-à-dire en cherchant des appuies et des prises naturels, au lieu de se hisser le long du câble.

De loin, nous pouvons déjà apercevoir le passage clé (D) de la variante: un véritable pont suspendu au-dessus du vide !

Severin est le premier à tenter la traversée. Il attache les deux mousquetons de son set via ferrata au câble suspendu au-dessus de sa tête et bouge lentement en avant (au fond, on peut apercevoir le "nid d'araignée").

Le "pont" s'avère pas très large :-)

Derrière moi, de nouveaux "ferratistes" apparaissent.

Une fois que Severin est arrivé au bout du pont, je le suis. Milliard, c'est très très exposé ! Apparemment, le pont fait 80m de longueur et se trouve à 50m au-dessus du sol. Je peux vous dire que c'est très impressionnant. Parfois, sous l'influence du vent, le pont commence à basculer, sensations garanties. Contrairement à Severin, je décide d'attacher les deux mousquetons aux câbles lateraux, car le câble supérieur est trop haut pour moi. Ca marche assez bien mais a comme inconvénient qu'il faut détacher les mousquetons à certains endroits, ce qui fait encore augmenter le stress. Ouff, enfin arrivé au bout ! Le passage suivant, le nid d'araignée, est spectaculaire également, mais moins rigolo quand même (ça fait très cours de gym).

Les passages suivants sont plus techniques et sûrtout très exposés.

Après 2h30, nous arrivons au sommet du Jegihorn. On est fort content de notre voie d'ascension: exposé, belle escalade, riche en moments forts, rigolo. Belle vue sur Chreuzboden, Saas Grund, Saas Fee et ses 4000...

Premier 3000m de la saison.

La déscente par la voie normale ne présente guère de difficultés et nous retournons de bonne heure aux Weissmieshütten, où nous passons un agréable après-midi à observer les montagnes (Lagginhorn, l'objectif du lendemain) et les groupes d'alpinistes...

L'ancien refuge (restauré), à côté duquel est construit le nouveau batîment (d'où les Weissmieshütten), d'où je prends la photo. Derrière, vue intéressante sur le Jegihorn. La via ferrata monte l'éperon à droite de l'énorme couloir avant de traverser celui-ci via le pont suspendu. A gauche, la voie de la descente.

Mon passe-temps préféré dans les montagnes ! Le soir, après le repas, nous demandons aux gardiens (couple ne débordant pas vraiment d'empathie, voir de patience) à quelle heure le réveil est donné pour le Lagginhorn: "3h45" est leur réponse. Quoi ? pour une course en rocher ?


29.08.2009: Weissmieshütten - Lagginhorn, 4010m (voie normale, II, PD) - Weissmieshütten


(extrait carte Swisstopo)

Ainsi dit, ainsi fait. Nous quittons le refuge à 4h45 du matin, il fait encore complètement noir. Du sommet du Jegihorn, qu'on a escaladé la veille, nous avons étudié le chemin d'accès au petit glacier du Lagginhorn, et pensons donc ne pas rencontrer de problèmes. Mais après une heure d'ascension, nous perdons la trace. Nous nous trouvons au milieu d'un énorme champ d'éboulis et devons traverser des pentes raides et scabreuses. Derrière nous, deux petites lampes nous suivent, c'est tout. Plus en bas, on aperçoit quatre personnes. Petit à petit, il commence à nous devenir clair ce qui s'est passé: nous avons pris la mauvaise moraine, celle qui mène vers le glacier du Tälli qui descend du Fletschhorn, et là actuellement, nous nous trouvons sur le flanc ouest de l'arête sud-ouest du Lagginhorn. Quelle stupidité de nous avoir réveillé si tôt, ça ne sert absolument à rien !

On hésite: attendre une heure que le soleil se lève et puis faire l'arête sud-ouest intégrale, ou bien descendre et remonter la bonne moraine en direction du Lagginhorngletscher ? On a envie de bouger et on opte pour la descente. On se retrouve vite en bas et retrouvons le bon chemin cette fois-ci. Après une montée de 400 mètres nous arrivons au petit glacier, totalement dépourvu de crevasses (ou presque). Entretemps, il est devenu clair. On décide de ne pas s'encorder mais mettons nos crampons car tout est bien gelé. En remontant le petit glacier, je rencontre pour la première fois des problèmes avec mes nouveaux crampons, qui ont la fâcheuse habitude de vouloir quitter le pied auquel ils sont attachés. Signe précurseur de ce qui allait m'arriver plus tard pendant ce séjour !

Vers 3400 mètres, nous atteignons l'arête. Je commence à traîner derrière Severin, qui est en meilleure condition que moi. Je vais piano, j'ai besoin d'un peu de temps à m'acclimater. Le terrain n'est pas très difficile, du I à II maximum.

Le massif du Weissmies à gauche. Dans le fond, les géants valaisans surgissent au-dessus du banc de nuages (Signalkuppe, Zumsteinspitze, Dufourspitze, Lyskamm, Rimpfischhorn, Allalinhorn, Breithorn, Alphubel).

Vu des Weissmieshütten, le Jegihorn est un sommet impressionnant. Mais de presque 4000mètres, il devient tout à fait insignifiant. Derrière, la chaîne de Mischabel (Täschhorn, Dom, Lenzspitze, Nadelhorn, Stecknadelhorn, Hohberghorn, Dürrihorn, Balfrin) et le majestueux Weisshorn (à droite de celui-ci, le Bishorn).

Les conditions sont vraiment excellentes ! Nous ne sommes pas obligés de prendre le flanc neigeux qui mène au sommet et le rocher à droite de l'arête n'est pas verglacé. Six heures après le départ du refuge, nous foulons le sommet du Lagginhorn, 4010m. C'est mon 9ème dans la série des 4000m !

Rapidement, nous faisons quelques photos. Il fait caillant et après dix minutes, je presse Severin à la descente. Derrière le Fletschhorn, les alpes bernoises (dont le Bietschhorn). Nous partageons le sommet avec quelques autres alpinistes.

Mais comment s'en aller si de tels paysages se dressent devant nous ? Le sommet sud du Lagginhorn, lequel est relié par une arête de difficulté III (c'est une course AD) au sommet principal, ressemble à un véritable château-fort. L'arête nord du Weissmies est plus impressionnante encore (AD+). Le sommet pointu à gauche du Weissmies est le Piz d'Andolla, 3653m.

Pas un peu fier :-)

Le sommet du Lagginhorn est une toute petite pointe au-dessus d'énormes abîmes.

Le névé supérieur qu'on a pu éviter par la droite.

Severin entame la descente, je le suivrai de près.

Retour sans difficulté, la neige du glacier étant devenu molle, je m'amuse à descendre en "skiant". Nous faisons une petite halte après avoir retraversé le Lagginhorngletscher. Nous nous prenons le temps de regarder de près mes crampons défaillants et Severin les ajuste un petit peu.

Une petite heure nous sépare encore du refuge, nous devrons passer par ce paysage lunaire.

Nous passons le restant de l'après-midi à nous reposer, à dormir, à boire des bières et à admirer toute cette beauté naturelle (même si les remontes-pentes de Hohsaas et les pistes de ski constituent une plaie dans le paysage). Nous discutons également des erreurs commises aujourd'hui: une préparation du sentier d'approche la veille n'est pas un luxe, nous devons davantage investir dans de bonnes cartes (echelle 1:25000) et un altimètre (ça nous aurait aidé un peu pendant qu'on pataugeait la nuit dans les flancs scabreux du Lagginhorn), et je dois faire gaffe au matériel que j'achète. De gauche à droite: Signalkuppe, Zumsteinspitze, Fluchthorn, Dufourspitze, Strahlhorn, Egginer, Rimpfischhorn, Allalinhorn et Feekopf.

La façade robuste de la nouvelle Weissmiesshütte. Le lendemain, nous prévoyons de faire l'ascension du Weissmies, et rêvons même de faire la traversée (montée par le versant nord-ouest, descente par l'arête sud) mais vu la descente interminable (2400m de dénivelé jusqu'à Saas Almagell) nous nous contenterons de faire la voie normale et de descendre par le même chemin.

Fletschhorn et Lagginhorn se baignent dans la lumière chaude du soir...

... alors que Dom et co nous saluent de l'autre côté de la vallée. Bonne nuit !


30.08.2009: Weissmieshütten - Hohsaas, 3098m - Weissmies, 4017m (voie normale, 35°, PD-) - Hohsaas - Weissmieshütten - Chreuzboden


(extrait carte Swisstopo)

Nouvelle fois un réveil à 3h45, on s'habituerait presque. Il ne nous faut qu'une demi-heure cette fois-ci pour s'apprêter. Aujourd'hui, nous n'avons aucun problème à retrouver le chemin de Hohsaas et progressons rapidement, chacun occupé par ses pensées.

Après une heure, nous passons Hohsaas et arrivons, après une petite descente, au bord du Triftgletscher, endroit traditionnel pour s'encorder. Severin s'occupe bien de tout cela: il est un excellent "premier de cordée" ! C'est la première fois que je m'aventure sans guide sur un glacier (et javais un peu de doutes inititales), mais avec un compagnon comme lui, je me sens bien confiant.

Dans la première partie du glacier, la trace zigzague à travers une zone assez plate mais remplie de nombreuses crevasses et il faut faire bien attention. Ensuite, le glacier se raidit de plus en plus.

Nous sommes un dimanche et il y a des dizaines et des dizaines d'alpinistes sur la trace. Nous arrivons à dépasser plusieurs cordées, preuve de notre bonne condition physique et acclimatation. Le massif sombre du Lagginhorn fait office de décor. A gauche, l'arête ouest qui constitue la voie normale, et à droite, l'arête nord.

La vue s'élargit: en premier plan, Almagellerhorn et Plattenhorn, derrière le Stellihorn et le barrage de Mattmark, et au fond le massif du Mont Rose, Lyskamm, Strahlhorn, Castor & Pollux, Rimpfischhorn, Breithorn et Allalinhorn.

Ca y est ! Après 4h et 1300m de montée sans difficulté particulière (un petit passage verglacé juste en-dessous du sommet) et presque sans faire de pauses, nous arrivons au sommet du Weissmies. C'est la première fois que je répète un sommet de 4000m (voir le récit de mon périple en 2005).

Le Lagginhorn est encore dominant ici mais les sommets derrière lui réclament toute mon attention: à droite, le Fletschhorn, au fond Blümlisalphorn, Bietschhorn, Breitlauihorn, Lauterbrunner Breithorn, Jungfrau et Aletschhorn.

Le sommet pyramidal est le Monte Leone, 3553m. Juste au-dessus, Galenstock et Dammastock. A l'extrème droite, le Tödi.

Joli sommet qu'on doit partager avec beaucoup d'alpinistes.

LA photo classique prise du sommet du Weissmies: l'arête sud, par lequel est venu Rêveur 4000 (D) et sa femme en août 2005, et derrière, les plaines italiennes couverts de la brume traditionnelle.

Je me réjouis d'avoir refait ce magnifique Weissmies mais un vent froid ne me fera pas rester longtemps sur ce sommet non plus.

Mais avant d'entamer la descente, une étude approfondie des sommets environnats s'impose: Portjenhorn, 3567m et Piz d'Andolla, 3653m, relié par la fameuse Portjengrat (AD+, IV), Mittelrück, 3363m, et Sonnighorn, 3487m.

Belle vue sur le Stellihorn, 3436m, beau sommet qui me fascine depuis quelques années maintenant.

Nous avons accompli une belle ascension...

... mais ne resterons que 10 minutes sur le sommet car il fait glacial. Une fois que nous quittons le plus haut point, nous pouvons profiter de températures clémentes. Avec attention, nous descendons la seule partie vraiment raide et ne permettant aucune erreur de l'ascension, un peu verglacée en plus.

Le Weismies me semble apporter de la chance car le temps est splendide comme en 2005.

Le massif du Lagginhorn.

Nous dévalons les pentes du glacier. Entretemps, nous passons à côté d'imposants séracs.

On est quasi à la fin de la zone de séracs. Plus bas, le glacier devient plat. A gauche, la zone de crevasses qu'il faudra retraverser.

Phantastique, cette journée ! Sans problèmes, nous retournons sur Hohsaas où nous buvons une bière pour fêter cette ascension. Après, la descente s'avère longue mais le paysage autour fait oublier toutes les peines. En début d'après-midi, nous arrivons à Chreuzboden. Mmm, ce serait un endroit génial à retourner avec les enfants: plaine de jeux, petit étang, restaurant... ce serait idéal pour une sortie en famille. A droite en-dessous du Lagginhorn, nous pouvons apercevoir les Weissmieshütten.

Nous avons le choix: soit nous descendons avec la benne, soit nous prenons les imposants "Monster-Trottis", espèce de mix entre VTT sans freins et un step franchement uh... monstrueux. Ouai d'accord, il fallait pas trop deviner...

Avec une vitesse furieuse, nous dévalsons les 900m qui nous séparent de Saas Grund. C'est fun, ça va vite, les freins fonctionnent bien, mais ce n'est guère confortable (pas de selle !) et je trouve dommage de ne pas plus savoir profiter de cette nature qui m'entoure. Je suis enchanté, cette vallée de Saas est un des endroits les plus merveilleux que j'ai déjà visités dans les Alpes.

Une fois arrivés à Saas Grund, nous rendons nos trottis et nous précipitons vers l'arrêt du bus où nous arrivons juste à temps pour sauter sur le bus Visp. A Visp, nous prenons le train qui nous fait traverser la vallée du Rhône. A Martigny, je descends. Severin, de son côté, rentre sur Lausanne. Ah, ça aura été un sacré petit séjour ensemble dans la vallée de Saas. Je me rends à ma chambre d'hôte et passe le restant de la journée à me changer, me laver, à découvrir l'agréable vieille ville de Martigny, et à manger une bonne pizza.

31.08.2009: Pont, 1950m - Rifugio Vittorio Emmanuelle II, 2732m

La nuit m'a fait beaucoup de bien. Quoique mes pieds sont un peu en compote, je me sens en pleine forme ! Après avoir fait quelques courses, je me rends à la gare de Martigny. Là, je fais la rencontre d'Oswald, guide de haute montagne de l'école d'alpinisme Montanara, et mes compagnons de route Adrian (Suisse, habitant de Zürich, et qui essaie le Mont Blanc pour la deuxième année consécutive) et Joanne (anglaise, habitante de Neuchâtel).

Nous montons dans la voiture d'Oswald et nous mettons en route vers le col du Grand Saint-Bernard. La vallée d'Entremont, que nous parcourons dans son entièreté, est à couper le souffle. Le paysage est grandiose et remplie d'histoire (dans la forme de nombreuses références vers le passage des armées de Hannibal et de Napoléon). De temps à autre, nous apercevons de superbes montagnes: Petit Combin, Mont Vélan, Grand Combin. Après le col du Grand Saint Bernard et son fameux hospice, nous suivons le Valle del Gran San Bernardo jusqu'Aoste. Enfin je me retrouve dans ce fameux Val d'Aoste, terre de prédilection de Rêveur 4000 (D). A Villeneuve, nous quittons la vallée d'Aoste et la grande route et rentrons dans le sauvage Val Savarenche. Au bout de la vallée, quelques maisons, un grand parking, un camping, et de superbes montagnes: Pont, 1960m.


Petite pause en terrace, et puis il est temps de se mettre en route.

Court passage tout plat, puis ça commence à monter. On remarquera que dans cette partie des Alpes, la limite des arbres est très élevé: les derniers spécimens énergiques se cramponnent à une altitude de 2400m !

Le Parco Nazionale del Gran Paradiso est parsemé de montagnes spectaculaires: à gauche, le Ciarforon, 3640m, et à droite, la Becca di Monciair, 3544m.

Le paysage est d'une sécheresse remarquable ici.

Après deux heures d'ascension paisible et très agréable, nous arrivons au futuriste Rifugio Vittorio Emmanuele II, 2732m.

La terrasse du refuge, ensoleillée, est un lieu de rencontre pour des alpinistes de diverses nationalités. Chouette détail: quand on demande une bière, on est servi une méga-bouteille de 0,67 l !

L'imposant Ciarforon, culminant à 3640m.

Becca di Monciair, 3544m, et Punta Foura, 34111m.

Comme d'habitude dans les refuges italiens, on y mange bien le soir. Nous allons dormir relativement tôt car une longue journée nous attend demain.

01.09.2009: Rifugio Vittorio Emmanuele II - Gran Paradiso, 4063m (voie normale, F+) - Rifugio Vittorio Emmanuele II - Pont - Courmayeur - Chamonix
Bien que brève, la nuit fut très agréable: le refuge Vittorio Emmanuele ne dispose pas de méga-dortoirs invivables mais de petites chambres dans lesquelles il fait bien dormir.


Les deux premières heures de l'ascension se déroulent dans un paysage de moraine et d'éboulis. Nous ferons une première halte à un replat situé de façon spectaculaire au-dessus du Ghiacciaio del Gran Paradiso. En face, un sommet secondaire du Grand Paradis, 3882m, et le Piccolo Paradiso, 3923m.

Vision spectaculaire: la Grivola, 3969m !

Les premières cordées se lancent dans l'ascension du glacier.

Cependant, nous opterons pour une variante: l'arête située à droite du glacier est munie d'une mini via-ferrata (facile) et débouche dans un cône de glace plus raide (40°), le "dos de l'âne".

Nous nous retrouvons presqu'à la hauteur du Ciarforon, qui nous présente sa voie normale (PD).

Le panorama est époustouflant: je découvre ici une partie des Alpes qui m'était totalement inconnu auparavant. Je reconnais un seul sommet: au fond se dresse la Barre des Ecrins.

Je ne peux que supposer de voir la Grande Casse, 3855m, au milieu, et l'Aiguille de la Grande Sassière, 3747m, à droite.

Heureusement, du côté du Mont Blanc, je m'y connais un peu mieux: Mont Blanc, Maudit, Tacul, Midi, Dent du Géant, Jorasses.

Après le "dos de l'âne", le glacier se raplatit. Cependant, on a connu un moment chaud. Vous vous rappelez de mes problèmes de crampons ? Et bien, en pleine montée d'une pente plus raide (40°), mes deux crampons décident de façon simultanée de quitter mes pieds! Jusqu'aujourd'hui, je ne comprends pas comment cela a pu se passer. Petit stress, petite frayeur. Heureusement, Oswald, quoiqu'un rien irrité, est là pour mettre une broche à glace sécurisante et me prête volontièrement ses crampons Grivel (apparemment, les miennes sont complètement inadaptées à mes chaussures) et j'arrive à continuer sans le moindre problème. Dorénavant, des crampons de la marque Petzl Charlet ne rentrent plus chez moi...

Le monarche dans toute sa splendeur.

Une fois la rimaye franchie, nous pouvons enlever nos crampons. Une escalade facile nous mène jusqu'au pied du bloc sommital. Là, c'est la file au niveau du seule passage un rien plus technique de l'ascension (un pas en II au-dessus d'un vide plus au moins impressionnant). Il faut savoir que le Grand Paradis est une montagne facile, et un 4000m en plus, donc les foules (inexperimentées) garanties. Mais on est patient, il fait beau, et à un moment donné, c'est à notre tour de monter jusqu'à la Madonne.


Photo classique prise du sommet du Grand Paradis, 4061m. Mais pour devenir classique, il faut que ça vaut vraiment la peine, et il n'y pas de doute possible ici.

Vue du sommet de la Madonne vers le sommet principal du Grand Paradis. Il est supposé être un rien plus haut (j'ai tendance à être d'accord avec ça) mais me demande s'il vaut vraiment la peine...

Maxi-panorama: au fond la chaîne du Mont Blanc, la Grivola et le Grand Combin. En premier plan: la Becca di Montandayne, 3838m, et le Herbetet, 3778m.

Ca y est: 10x4000m ! (d'accord, je promets d'arrêter de faire ça sur chaque 4000m)

Incroyable vision tout à fait au fond, à 200 kilomètres: le Monviso, 3842m.

Le sommet pyramidal devant est le Monte Emilius, 3559m. Derrière, les géants du Valais lui volent l'attention: Weisshorn, Dent Blanche, Cervin, Mischabel, Monte Rosa.

Après une petite halte au sommet, Oswald décide de descendre (il faut bien laisser la place aux caravanes suivantes !). Pas de peine, pas de frayeur cette fois-ci.

Descente paisible...

... à travers un paysage glaciaire fabuleux ...


... pour finir au replat mentionné ci-dessus où nous faisons une pause bien méritée.


Après, la descente jusqu'au refuge se fait dans le calme et la contemplation silentieuse, digne du désert qui nous entoure ici.

La bière consommée en terrasse goûte bien après cette course de 1330m de dénivelé.

Nous retournons sur Pont en prenons la route de Chamonix. Traversée de Courmayeur et du coûteux tunnel du Mont Blanc (vision hallucinante, voir déprimante: du côte italien, la bouche de ce tunnel congesté de poids-lourds se trouve juste à côté du glacier de Miage en-dessous de la fameuse Aiguille Noire). Arrivés à Chamonix, nous nous dirigeons vers l'hôtel La Chaumière, qui respire véritablement la montagne (pas difficile car dirigé par une famille de guides de haute montagne). Le soir, nous discutons de notre ascension du Mont Blanc imminente: demain, nous monterons jusqu'au refuge du Goûter, et le lendemain nous ferons la traversée des trois monts par Mont Blanc, Mont Maudit et Mont Blanc du Tacul.

02.09.2009: Chamonix - Martigny - Rhônegletscher, 2272m - Furkapass, 2436m - Tiefenbach, 2110m - Albert-Heim-Hütte, 2543m - Tiefenbach


(extrait carte Swisstopo)

Après le petit déjeuner, nous partons vers les Houches pour prendre la benne de Bellevue. Situation surréaliste: après 1km de route, nous faisons demi-tour. Oswald a eu contact avec son patron, et celui-ci est formel: ne l'essayez même pas, demain il fera très mauvais en hauteur (neige et tempête). C'est la déception (doublement pour Adrian car sa tentative se termine de la même façon que l'année précédente), même s'il ne faut pas trop s'étonner: l'ascension de hautes montagnes, et spécialement le Mont Blanc, est souvent un jeu de chance avec la météo et les conditions.

Nous rentrons sur Martigny via le Col de Forclaz. Il y a peut-être encore une chance de faire une course, la météo ne sera pas exécrable partout dans les Alpes. Après consultation avec son bureau, Oswald nous propose l'ascension du Galenstock, fière gardien du glacier du Rhône en Suisse centrale. Nous n'hésitons pas, c'est une joli course sur un sommet prestigieux, et acceptons l'alternative proposée.

Je retraverse toute la vallée du Rhône. Passé Brigue, je découvre la vallée superieure du Rhône, le Goms. A gauche, les vallées étroites déscendant des grand glaciers des Alpes bernoises, à droite les Alpes lépontines, peu connues et fréquentées, qui me fascinent depuis longtemps. A Gletsch, la route se sépare: à gauche, ça monte au col de Grimsel, 2165m, tout droit, au col de Furka, 2421m.

A mi-chemin du col de Furka, l'hôtel Belvédère constitue une halte classique. De la terrasse, le touriste peut profiter d'un beau panorama sur le glacier du Rhône, qui a sa source ici. On peut également aller voir une grotte artificielle dans le glacier, mais comme cela est payable, notre visite sera courte.


Le Rhône, tout jeune et sauvage.

L'hôtel du Belvédère, surmonté par le Muttgletscher et le Gross Muttenhorn, 3099m.

Du col de Furka, nous voyons le Galenstock, 3586, dont l'objectif de demain est l'éperon sud-est qui traverse la paroi de droite à gauche.

Nous nous installons à l'agréable hôtel Tiefenbach, 2106m. Oswald rentre chez lui à Andermatt, village tout proche, Adrian va rendre visite à un guide local dans le but de récupérer un ski qu'il avait perdu en hîver dernier, et c'est comme ça que Joanne et moi-même décidons de faire une petite promenade d'après-midi jusqu'au refuge Albert Heim. On notera que le paysage est nettement plus vert que par exemple la vallée de Saas ou le parc national du Grand Paradis. Effectivement, la région du Gotthard reçoit énormément de précipitation (dû au foehn).

Nous parcourons les derniers centaines de mètres jusqu'au refuge dans la pluie. Le refuge Albert Heim, 2543m, se trouve dans un paysage absolument phantastique et est le point de départ pour maintes promenades, ascensions alpines et voies d'escalades. Mais hélas, aujourd'hui, le gris domine.

Dès que la pluie s'arrête, nous quittons le refuge et descendons les 400 mètres qui nous séparent de l'hôtel Tiefenbach. Un bon repas et une agréable soirée clotûreront cette journée qui n'aura pas vraiment tenu ses promesses.

03.09.2009: Tiefenbach - Sidelenhütte, 2708m - Galenstock éperon sud-est (essai jusqu'à 3150m) - Sidelenhütte - Tiefenbach


(extrait carte Swisstopo)

Nous partons de bonne heure de l'hôtel. Il fait encore noir qu'on est déjà sur le chemin du refuge de Sidelen. En mi-chemin, nous devons sortir notre veste car il commence à pleuvoir.


Ce coin est un véritable paradis pour grimpeurs: Rêveur 4000 (D) y trouverait son bonheur ! Gross et Klein Furkahorn, Galengrat, Gross Bielenhorn, Chli Bielenhorn avec son fameux "Schildkrötengrat", la tour d'Hannibal, et les formes bizarres du Gross et Chli Kamel, 2900m, on y resterait facilement une semaine.

Arrivée au Sidelenhütte. L'enthousiasme est en train de diminuer, la météo n'est pas prometteuse.

Le très chaleureux et agréable refuge de Sidelen.

Pendant un petit moment, un ciel bleu fait monter notre espoir.

Après une petite pause café, nous reprenons le chemin du Galenstock. Nous montons le glacier de Sidelen non encordés car risque de crevasses très réduit. Vers 3150m, nous arrivons au pied de l'éperon sud-est du Galenstock.

Nous restons entourés par les nuages et en plus, le vent souffle fort. Nous décidons d'attendre une amélioration.

Les premiers mètres d'escalade de l'éperon sud-est du Galenstock (PD, III).

Finalement, nous rebrousser chemin. On ne peut pas prendre le risque de se retrouver sur l'arête sommitale en pleine tempête. Mais le temps semble nous narguer, un beau ciel bleu apparaît au-dessus du Galenstock.

Bien au-dessus des crevasses du glacier de Sidelen.

C'est bien dommage de ne pas pouvoir grimper sur ce magnifique granite.


Derniers mètres sur le glacier. Vue sur Leckihorn, 3068m, et Pizzo Rotondo, 3192m.
Voilà la fin d'un très beau séjour dans les Alpes suisses, italiennes et françaises. Je n'ai toujours pas fait le sommet du Mont Blanc, mais les autres sommets en valaient largement la peine. Je me rends compte que le Mont Blanc est un sommet très haut et que plusieurs facteurs décident d'une réussite ou non: une bonne condition physique, une météo clémente et sûrtout beaucoup de temps à sa sa disposition !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Tu mets le rève à portée de main (rèveur 4000 D)