jeudi 6 juillet 2006

Bergell 2006: paradis granitique à cheval sur la Suisse et l'Italie

Il est vrai: cette année 2006, le Bergell n'était pas mon but premier. J'avais réservé un forfait 'Traversée de la Bernina' organisé par l'école d'alpinisme suisse 'Berg und Tal' (http://www.bergundtal.ch/) et attendait beaucoup de cette superbé région de l'Est de la Suisse. La Bernina n'a pas seulement le seul 4000 des Alpes orientales, la Piz Bernina, mais possède également de superbes sommets comme le fameux Piz Palü (dont on allait faire la traversée) ou aussi le Piz Roseg. Hélas, le séjour fut annulé car il s'avérait que j'étais le seul participant ! Comme j'avais déjà acheté mon billet de train pour Pontresina et n'avait plus vraiment envie de changer cela, je cherchais une alternative dans la région et la trouvait rapidement dans un massif voisin de la Bernina, le Bergell. Tiens, le Bergell, c'est quand même là où se trouve le Piz Badile et sa fameuse paroi nord-est, non ? Après concertation avec Rêveur 4000 (D), connaisseur du coin, et un peu de recherche sur le web, j'étais sûr: j'allais faire la semaine 'Bergell-Monte Disgrazia', organisé par la vénérable école d'alpinisme de Pontresina (http://www.bergsteiger-pontresina.ch/).


(Extrait Swisstopo)

Départ comme d'habitude de la gare du Midi, le bon vieux 'Vauban' en direction de la Suisse. Changement à Bâle, puis à Chur, finalement à Samedan pour Pontresina. Grâce aux chemins de fer suisses, cela se déroulait sans retard quelconque ! Ci-dessus, vue du fameux trajet entre Chur et St Moritz, véritable paradis pour les amateurs de trajets ferroviaires spectaculaires.

Après St Moritz et le col de Maloja, le bus descend dans le Val Bregaglia, enclave italophone dans les Grisons (Graubünden). Halte à Promontogno, à 821m. Grand beau temps !


On sent qu'on est dans le Sud ici. Je démarre à l'aise, car il fait bien chaud et le chemin est long. Avant de rejoindre le groupe, j'ai décidé de visiter le Val Bondasca, haut-lieu d'escalade sur des pics superbes granitiques et de traverser la crête de Sciora via le réputé col de Cacciabella jusqu'au lac artificiel d'Albigna, notre point de rencontre.


J'atteinds le refuge de Sasc Füra, 1904m après une très raide montée de 3 heures.


Un peu au-dessus du refuge, les premières vues sur la montagne que je rêvais de voir depuis des années ! Et je ne fut pas déçu, arête nord et sommet incroyable dans un paysage très spectaculaire. Et si je revenais un jour pour l'escalader ?


Du col de Viale, vues sur les aiguilles du groupe de Sciora. Ici, on est dans le paradis des sestogradistes.


Il m'attend encore une longue traversée jusqu'au refuge de Sciora, but de la randonnée d'aujourd'hui.


Le couple Piz Cengalo (3370m) et Piz Badile (3308m).


Il se dit que quand on voyage seul, souvent le sac à dos est son meilleur ami !


Après 7h de marche, arrivée au refuge de Sciora, 2118m.


On est en début de saison, et je suis quasi seul dans le refuge. Heureusement, je ne dois donc pas partager ces dortoirs avec d'autres personnes, car on n'a pas beaucoup de place ici.


Je passe des heures autour du refuge, en contemplant le paysage fantastique.


Cengalo et Badile continuent à fasciner.


Fier d'être là, en-dessous de ces parois énormes de 1000m de hauteur.


J'avais lu quelques récits de sa traversée, et ce panneau me le confirmait: je ne pouvais pas prendre le col Cacciabella à la légère !


Après le petit déj à 7h, départ pour le col. Vue géniale sur le Piz Gemelli, 3262m.


En montant, les géants ne cessent de devenir plus majestueux encore.


Voici un détail de la montée au col. Il faut monter le champ de neige et ensuite traverser la paroi de droite à gauche. Il n'y avait pas beaucoup de neige et de temps en temps, des cordes fixes étaient installées, mais le rocher était de mauvaise qualité: à un moment donnée, j'ai fait tomber un bloc de 1 sur 1.


Vue du col sur les sommets du Val Bondasca.


L'autre côté du col me dévoilait la montée au sommet qu'on allait faire le lendemain: le Cima di Castello (à droite de l'image).


Rencontre au lac d'Albigna avec Jörg, Suisse, et notre excellent guide Albert Brunner, Suisse également (voilà son site web: http://www.geniesse-die-berge.ch/). Celui qui fait la photo c'est Frank, Anglais (sacré gaillard de 60 ans qui avait réussi tous les 4000m suisses). Il s'avérait que la dernière participante, la Suissesse Beate, nous attendait déjà au refuge Albigna, 2340m.


On part relativement tard du refuge. Ici, ce sont les alpes orientales, donc il n'y a pas lieu de devoir se lever à des heures idiotes.


Le glacier monte graduellement. Cette ascension est catégorisée F+, et constitue une belle course d'initiation.


Petit repos avant de passer un passage crevassé plus raide. Plus haut, Albert décide d'attaquer le sommet directement. Mais la paroi (45°) ne consiste plus en neige mais en glace dûre. J'hésite un peu et voilà, je glisse, et tombe d'une dizaine de mètres ! Heureusement, mes compagnons me retiennent. Après, Albert décide de contourner la base sommitale par la droite.


Vues du sommet sur le Monte Sissone (3330m), qui sera également sur le programme, et les Pizzi Torrone (3351m).


Petit passage de II avant d'atteindre le sommet du Cima di Castello, 3370m.


Longue descente par un couloir au refuge Allievi. A partir de maintenant, nous sommes en Italie.


Arrivée au refuge Allievi, 2395m. Comme d'habitude, les refuges italiens ne sont des plus jolis (je les vois mal affichés sur un calendrier par exemple) mais l'accueil et - on s'étonnerait - les repas sont très bien.


Dîner au refuge Allievi. Celui-ci est fréquenté par les randonneurs qui font la fameuse et difficile 'Via Roma' et - regardez bien les topos sur le mur ! - les grimpeurs qui viennent se régaler sur les parois et voies granitiques, pour lesquelles le Bergell est connu.


Notre randonnée nous amène à franchir trois cols aujourd'hui. Ici, on se retrouve dans la descente du Passo Val Torrone, 2518m.


Vue sur les Pizzi Torrone (voir aussi ci-dessus). On comprend pourquoi cette région est un véritable paradis pour les grimpeurs. A droite, l'aguille dite "de Cléopatra".


Montée vers le deuxième col de la journée, le redoutable Passo Cameraccio, 2950m. Celui-ci est très comparable au col Cacciabella.


Du haut du col, on voit enfin LE but de ce séjour: l'énorme Monte Disgrazia. Mais la route est encore longue ! A gauche, le Monte Sissone, 3330m.


Repos bien mérité.


Une longue traversée du haut du Val di Mello vers le dernier col du jour, la Bochetta Roma, 2898m.


Et voilà le refuge Ponti, où on allait passer les deux nuits suivantes. A nouveau, pas de charme particulier, mais le gardien est très sympathique.


Levée à 4h, départ à 5h. Voici toute la voie de l'ascension du Monte Disgrazia: on monte le glacier jusqu'au col au milieu (Sella di Pioda, 3387m), ensuite on suit l'arête vers la droite.


Petite préparation avant d'entamer la montée. On boit et on mange quelque chose, on met le baudrier, on chausse les crampons, etc.


Une fois arrivé au col, on a dû monter une très raide et lisse paroi avant d'arriver sur l'arête. En raison des changements climatologiques des dernières années, le glacier a perdu beaucoup de son épaisseur et la voie est devenue plus difficile.

Voici ladite paroi. L'arête se perd dans le brouillard.

L'escalade est vraiment géniale. Jamais difficile, mais toujours aérienne.


Des passages plus verticaux ...


... ici, on traverse une petite paroi...


... le Monte Disgrazia n'est pas composée de granite, mais de serpentine.


On se trouve droit au-dessus de la paroi nord, haute de 700m. Ici, il ne faut pas avoir le vertige !


Le guide nous montre la suite du chemin.


Sur le sommet de la Monte Disgrazia, 3678m.


Vue sur l'antécime. Beate allait nous attendre là, elle était moins douée en rocher et entre l'antécime et le sommet principal se trouve le passage clé de l'arête, le 'Cavallo di Bronzo' (cheval de bronze), passage de III.


Frank et Jörg descendent le Cavallo.


Albert vient également de descendre le passage clé.


Petit repos sur l'antécime, et déjà on entame la déscente.


Il faut toujours resté concentré...


... mais il y a de bonnes prises partout.


Installation d'un relais juste au-dessus du col. Le rocher est terriblement pourri ici (suite de la fonte du glacier) et nous oblige à prendre toutes les précautions.


Et voilà, le plus difficile est fait !


Dortoir du refuge Ponti.


Le refuge Ponti et la Monte Disgrazia.


Le temps se détériore. Une fois arrivé à la Bochetta Roma, qu'on devait franchir à nouveau, un violent orage nous tombe dessus. Il y a de l'electricité dans l'air, le tonnerre et la grelle nous chassent vers le bas.


Néanmoins, pour arriver au refuge Forno, du côte suisse, on doit impérativement franchir le Monte Sissone. Les conditions ne s'améliorent pas mais on réussit. Ceci dit, le Monte Sissone aura été le sommet sur lequel j'aurai passé le moins de temps, une demi-minute à peu près !


Une fois en-dessous des nuages, belles vues sur le glacier du Forno. On cherche son chemin à travers les crevasses, entreprise pas sans risques car le guide tombe dans une crevasse. Heureusement, nous sommes quatre à le retenir.


Il fait très sombre, mais nous y sommes preque.


Nous voilà en bas. Je montre le flanc du glacier qu'on vient de descendre.


Randonnée sur le glacier du Forno en direction du refuge de Forno, 2574.


Hélas, le lendemain, le temps s'est encore gâté. Il pleut, et le brouillard nous entoure.


On décide de voix unanime d'annuler le dernier sommet du séjour, le Piz Casnile, et on descend au col de Maloja. Une autre semaine dans les montagnes se termine.