dimanche 10 juin 2012

Petite traversée des Glarner Alpen ou l'art de l'orientation en conditions difficiles

 J 1 (08/06/2012): Mollis (440m) - Murgseehütte (1817m), + 2040m, 15.5 km





Nous voici encore une fois dans la montagne. Cette fois, nous changeons de tactique, nous faisons le trajet après le travail le soir et dormons sur place comme dans l'Alpstein. Mais cette fois, Rêveur 4000 H avait transformé sa voiture en petit palace pour fin de nuit, il y avait même un matelas. C'est une solution beaucoup plus rationnelle et reposante.

Après 7h00 de trajet nous sommes arrivés tant bien que mal au point repéré par Rêveur 4000 H (encore, et oui c'est un as de l'organisation) pour finir la nuit, il est environ 2h30 du matin. Les conditions sont cauchemardesques, on annonce 40 litres d'eau par mètre carré. Ça va être chaud.


Le matin néanmoins, il fait sec et nous apercevons même des montagnes, totalement inconnues d'ailleurs. Ce coin de la Suisse ne doit pas drainer beaucoup de touristes. Cette région est surtout connue pour ses rentiers. Nous ne sommes finalement pas très loin de Zurich.


Nous sommes charmés par l'endroit, un petit Heidiland, mais la pluie recommence, alors on avance. On avance même très bien sous les forêts de feuillus au beau milieu d'une nature luxuriante.


Une orchidée, elle superbe et il y en a d'autres, il suffit de baisser les yeux pour embrasser la beauté des lieux. Finalement la montagne c'est cela aussi, l'horizon n'est pas seul.


Photo spéciale dédicace pour un ami commun, Ben, ingénieur de son état. Il faut remarquer que les Suisses ont le sens pratique, le sens du détail et de la perfection pour ce qui n'est finalement qu'une barrière à piétons. Remarquons qu'ils ont mis un contre-poids.


Le paysage se dégage, nous avons la vue sur la vallée de Glarus qui est en train de se couvrir de nuages, qui montent ...


Voilà, nous sommes au point où à peu de choses près le brouillard ne nous quittera plus un instant. Là on se demande tout de même si finalement on vient en montagne pour le paysage mais bon, nous continuons. Petite pause.


Nous sommes dans les environs du Fronalppass vers 1900m, on ne voit rien. Nous envisagions de monter au Fronalpstock mais dans ces conditions ce sera déjà un bon exercice de trouver le refuge.


Des pulsatiles, magnifiques. J'adore ces fleurs, les fleurs de montagne en général. Non pas que les autres soient moins bien, mais leur floraison est si fugace qu'on en serait ému pour le moins.


Une autre preuve irréfutable de l'organisation suisse si besoin était...


Là nous sommes dans les environs du Schilt (2299 m) que nous allons aller voir. La randonnée à vache se transforme en raid à orientation (très) délicate. Il y a encore beaucoup de neige et dans le brouillard on ne voit pas à 10 m. C'est parti pour un bon exercice, avec la carte au 1/60000....


Un des seuls moments sans nuage. De toute façon le sentier est sous 2 m de neige.


Le Schilt (2299 m), vaillamment grimpé, surtout difficile à trouver. Là on est trempé, complètement relavé. Les doigts sont engourdis mais finalement nous sommes extrêmement heureux d'être là, dans la fureur des éléments, finalement nous sommes complètement en paix avec la montagne, un sentiment de plénitude nous envahit, même si la route est encore longue avant le confort et la chaleur du refuge.


Rêveur 4000 H est dans le même état, il n'a plus rien de sec sur lui mais est heureux d'être là après presque 2000m d'ascension. Quelle joie encore plus profonde de voir son compagnon de cordée satisfait et dans son élément.


Les photos se font plus rares, de toute façon c'est le white out. Depuis le Schilt nous avons eu la grêle, un peu de neige fondante, la pluie battante, une éclaircie vers le Wisschöpf (2290m) et je me dresse vaillamment sur le Schwarzstökli (2385m). Il fait encore plus mauvais et le meilleur reste à venir. L'orientation qui était délicate jusqu'à présent va devenir carrément difficile.


Quelle descente, nous n'avons rien vu de la trace habituelle, nous avons louvoyé dans les barres rocheuses et les névés raides. Nous avons même désescaladé une barre. Quelle rigolade dans les névés, heureusement qu'après toutes ces années nous avons maintenant le pied montagnard, je ne m'inquiète d'ailleurs pas un seul instant pour mon compagnon qui descend en ramasse vraiment comme il le faut. Sur la photo c'est moi qui suis couché.

Nous avons trouvé le refuge et finalement c'est à quelque centaines de mètres de ce dernier que nous avons un peu cherché notre chemin. Est-ce le relâchement, la fin des difficultés ? Toujours est-il que c'est Rêveur 4000 H qui en à trouvé l'accès et règle les réservations (ça c'est lui aussi).


La petite collation nous fit du bien, la deuxième aussi.


Quel repas !!! On ne peut pas parler d'un accueil chaleureux au Murgsee Berggasthaus mais la gastronomie est à la hauteur des paysages traversés.


Je me fais plumer au UNO en descendant quelques schnaps et quelques bières, puis dodo. Enfin, on essaye car certains locataires en profitent pour faire la fête jusqu'à des 4h00 du matin. C'est très courant lorsqu'on n"est pas dans un refuge d'un club alpin. Nous en rigolons bien entendu mais sur le moment, après une journée comme celle-ci nous aurions préférés dormir un peu. Mais bon c'est cela aussi la montagne.

J 2 (09-06-2012) : Murgseehütte (1817 m) - Spitzmeilenhütte, 2087 m, + 1000m, 14 km



Départ pour une deuxième jour de folie. Les organismes tiennent bien le coup et nous ne sommes pas trop fatigués de la nuit que nous venons de subir.


Le refuge est vite quitté, nous ne sommes pas fan de ce genre d'endroit (quoique on aime bien la fête aussi),  mais là il faut se concentrer parce que les conditions sont les mêmes que la veille, néanmoins il ne pleut pas. Nous devions initialement passer par le nord du massif mais ça ne passe pas, alors nous essayerons par le sud (nous saurons à la Spitzmeilenhütte que nous étions les premiers de la saison à faire la traversée en rando).


La visibilité est fantastique, nous voyons le col. Puis nous allons au sud, gage de moins de neige (normalement).


Le lac encore partiellement gelé, quelle belle vue.


Nous montons à notre rythme, nous chauffons les moteurs et les esprits en vue des difficultés qui nous attendent pour la suite. Le col passera tranquillement.



On voit ici le chemin parcouru, à la descente ce doit être super.


Rêveur 4000 H.


Les nuages montent, le white out vient vers nous.


Le col est atteint avant les nuages, ça évite de devoir sortir la carte et de faire de la navigation. Tant mieux.


Nous sommes passés versant sud, les nuages nous ont enveloppés au col mais il suffisait de suivre le talweg dans la neige pour trouver la jonction des chemins complètement déneigés. Tout roule, on s'amuse et on va randonner tranquillement quelques heures en discourant tour à tour dans des espaces dégagés et des sapinières.
 

Quel beau chemin, en été ou plutôt lorsque tout est dégagé ça doit être chouette ici.


Il reste tout de même un peu de neige mais là il faut bien dire que nous sommes sur une coulée d'avalanche.


Les difficultés s'annoncent vers le Wissmilenpass (2420m) alors nous mangeons quelques provisions. Tout est relax, nous savons exactement où nous allons et le gps est allumé au cas où avec le col encodé à quelques mètres près. Ca passera néanmoins à la boussole et alti.


De nouveau white out mais avec un peu plus de vue tout de même. Ce qui m'a frappé c'est le calme absolu qui régnait. Le paradis doit ressembler à ça, le temps est suspendu, nous sommes seuls au monde et rien ne vient troubler cet état.


Le Wissmilen (2483 m), il y a quelques jours des skieurs l'ont grimpé. La descente s'annonce chouette, toute en glissade. Néanmoins je préfère rester prudent et regagner le col. Nous ne connaissons pas du tout le coin et la carte (1/60000) ne nous informe pas du tout d'éventuelles barres rocheuses.


Au bas de la pente et tout au long du chemin nous n'y verrons rien, j'ai pris le gps et je rallie le refuge. Quelle facilité avec ce matériel et puis quelle précision. Mais attention, il ne remplacera jamais une carte avec boussole et altimètre.


Content d'avoir pris le petit engin. Nous sommes contents d'avoir nos piolets aussi, dans les pentes raides en ramasse c'est plus rassurant.


La pause à la sortie des difficultés, nous sommes à moins d'un km du refuge, nous savons exactement où nous sommes, on sent le soleil (si si) qui veut percer les nuages. Notre bonheur est total. Personnellement je m'allongerais là dans la neige pour dormir du sommeil du juste avec il est vrai un sentiment du travail bien fait.
 

Tip top, pile dessus.



La collation, la petite soeur, la littérature alpine. Nous sommes bien dans un refuge SAC (de nouveau réservé par Rêveur 4000 H). La gardienne est vraiment super accueillante, il y a du thé gratis pour les arrivants, on adore. Le repas est plus militaire mais on dormira bien, c'est un véritable hôtel.



Le petit rituel du récit dans le carnet de randonnées.


Je me fais encore plumer au UNO, j'ai vraiment pas de chance au jeu, et puis après quelques verres c'est dur.

J 3 (10/06/2012): Spitzmeilenhütte - Flums, -1700 m, 15.2 km


La descente est rapide, dons devons attraper le train de 10h25 et en principe il faut 5h00 pour descendre. Qu'à cela ne tienne, vu les qualités physiques de Rêveur 4000 H nous descendrons en moins de 3h00.


Une petite vue du refuge avant de plonger dans la vallée vers le train (c'est encore Rêveur 4000 H qui a organisé toute la logistique pour retrouver le véhicule).



Une dernière petite pente de neige en glissade pour la route.


Il y a des buveurs de bière par ici, mais ils sont tolérants dans le coin :-)

Ce fut une belle randonnée, pleine de bonnes surprises toujours en bonne compagnie. Néanmoins, Rêveur 4000 H devrait faire la formation d'accompagnateur en moyenne montagne, ça passerait bien. En tout cas côté organisation c'était chouette. Vive le Schnupftabak et le schnaps.